Vente en ligne de médicaments : levée de l’interdiction, pour les pharmaciens, de recourir au référencement payant pour accroître leur visibilité sur internet
Les pharmacies françaises vont désormais pouvoir recourir à un référencement payant pour faire la publicité des produits qu’elles sont autorisées à vendre en ligne. En effet, dans une décision en date du 17 mars 2021 (n°440208), le Conseil d’Etat a jugé illégale l’interdiction de référencement payant des sites de vente en ligne de médicaments et a enjoint au Ministre des Solidarités et de la Santé d’abroger, dans un délai de deux mois, la disposition litigieuse figurant dans l’arrêté du 26 novembre 2016 relatif aux règles techniques applicables aux sites internet de commerce électronique de médicaments. Ladite disposition, que le Ministre des Solidarités et de la Santé avait refusé d’abroger dans sa décision en date du 9 février 2020, interdisait jusqu’alors la recherche de référencement dans des moteurs de recherche ou des comparateurs de prix contre rémunération.
Désormais, à compter du 17 mai 2021, les pharmaciens auront le droit de faire de la publicité en ligne en utilisant un référencement payant afin de vendre des produits et des médicaments non soumis à une prescription médicale.
Pour rappel, le Conseil d’Etat s’était déjà prononcé sur cette question du référencement, dans une décision en date du 4 avril 2018 (n°407292), et avait considéré alors que la disposition interdisant le référencement payant des sites internet de pharmacie était légale et ne pouvait être regardée comme soumettant le commerce électronique de médicaments à des contraintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi de protection de la santé publique.
Plus tard, à l’inverse, dans un arrêt en date du 1er octobre 2020 (aff. C-649/18), la Cour de justice de l’Union européenne avait estimé qu’un Etat membre ne pouvait pas interdire aux pharmacies proposant un service de commerce électronique de médicaments de recourir au référencement payant dans des moteurs de recherche et des comparateurs de prix, à moins qu’il ne soit dûment établi devant la juridiction nationale qu’une telle restriction est apte à garantir la réalisation de l’objectif de protection de la santé publique et qu’elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.
Sans faire directement référence à l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne précité, le Conseil d’Etat explique dans sa récente décision que l’interdiction jusqu’alors posée ne permettait pas, contrairement à ce qu’invoquait le Ministre des Solidarités et de la Santé, d’atteindre l'objectif de lutte contre la surconsommation de médicaments et contre le mésusage de ces derniers, étant donné que les clients français peuvent accéder aux sites localisés dans un autre État membre de l'Union européenne qui ne sont pas soumis à la même interdiction de référencement.
Cette particularité française créait au contraire, pour les pharmacies françaises, un désavantage face à des sites localisés ailleurs dans l’Union européenne et qui bénéficiaient d’une meilleure visibilité susceptible de leur permettre de concentrer une part accrue des ventes de médicaments et d’affaiblir ainsi la situation des officines françaises.
Enfin, le Conseil d’Etat écarte le dernier moyen invoqué par le Ministère des Solidarités et de la Santé en ce qu’il n’est pas établi que l’interdiction du référencement payant pour les seules officines situées en France serait de nature à préserver la relation de confiance entre le patient et le pharmacien, dès lors qu’elle permet aux clients français d’acheter plus facilement des médicaments auprès de sites qui ne sont pas soumis aux garanties déontologiques applicables aux pharmaciens installés en France.
Cette décision du Conseil d’Etat du 17 mars 2021 constitue une grande avancée pour la vente en ligne de produits autorisés par les pharmacies françaises. Pour rappel, la vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale est autorisée en France depuis le 2 janvier 2013, mais les règles l’encadrant sont strictes, ce qui constitue un frein à son déploiement.