Les nouveaux régimes de prise en charge des dispositifs médicaux numériques et de la télésurveillance médicale
La loi n°2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale (« LFSS ») pour 2022 consacre une évolution bienvenue et attendue dans la prise en charge des dispositifs médicaux numériques et des activités de télésurveillance. Deux mécanismes distincts ont ainsi été insérés dans le Code de la sécurité sociale.
La prise en charge de la télésurveillance médicale
A l’instar des actes de téléconsultation et de téléexpertise, les activités de télésurveillance médicale seront, au plus tard le 1er juillet 2022, prises en charge au titre du droit commun, et non plus de façon dérogatoire en application de l’expérimentation « ETAPES ».
La télésurveillance médicale fait désormais l’objet d’une définition légale et renvoie aux interventions associant (1) une surveillance médicale et (2) l’utilisation de dispositifs médicaux numériques. A ce titre, la télésurveillance médicale implique l’utilisation de dispositifs ayant pour fonction de collecter, d’analyser et de transmettre des données physiologiques, cliniques ou psychologiques et d’émettre des alertes lorsque certaines de ces données dépassent des seuils prédéfinis et, le cas échéant, des accessoires de collecte associés, lorsqu’ils ne sont ni implantables, ni invasifs et qu’ils sont dépourvus de visée thérapeutique.
L’un des apports majeurs de cette mesure réside dans l’élargissement de son champ d’application. En effet, l’inscription des activités de télésurveillance médicale sur la liste créée à cet effet (liste « télésurveillance »)se fera par indications. La prise en charge ne sera ainsi plus limitée aux cinq pathologies ciblées par l’expérimentation « ETAPES ».
Outre l’inscription des activités de télésurveillance médicale sur la liste « télésurveillance », les conditions d’éligibilité à la prise en charge et au remboursement sont les suivantes :
- La surveillance médicale devra nécessairement être assurée par un opérateur de télésurveillance médicale, dont tout ou partie des activités auront préalablement été déclarées à l’agence régionale de santé, et
- Les dispositifs médicaux numériques, définis comme tout logiciel répondant à la définition de l’article 2 du Règlement (UE) 2017/745, devront avoir été mis à la disposition de l’assuré par ledit opérateur (soit directement en tant qu’exploitant, soit par l’intermédiaire d’un exploitant ou d’un distributeur avec lequel il a conclu une convention).
L’inscription, sollicitée par l’exploitant du dispositif, sera effectuée sous la forme d’un référentiel, après avis de la CNEDiMTS quant à l’existence d’une amélioration de la prestation médicale au regard des référentiels inscrits dans l’indication concernée, ou à défaut, au regard d’une prise en charge identique sans télésurveillance. A ce titre, un système de radiation progressive des référentiels apportant une amélioration moins importante est mis en place.
Cette prise en charge prend la forme d’un forfait dont le montant est fixé par arrêté ministériel.
Par ailleurs, malgré la fin de l’expérimentation « ETAPES », prévue un mois après l’entrée en vigueur du nouveau régime, soit au plus tard le 1er août 2022, les expérimentations engagées pourront continuer à bénéficier de leur prise en charge financière dérogatoire. C’est dans ce même délai d’un mois à compter de l’entrée en vigueur du nouveau régime que devront être déposées les demandes d’inscription sur la liste « télésurveillance » afin que la prise en charge transitoire soit maintenue, au plus tard jusqu’au 31 décembre 2022.
La prise en charge anticipée des dispositifs médicaux numériques et de la télésurveillance médicale
Afin de garantir un accès précoce à l’innovation, la LFSS pour 2022 consacre un nouveau dispositif de prise en charge anticipée, d’une durée d’un an non renouvelable, portant à la fois sur :
- Les activités de télésurveillance médicale telles que définies ci-dessus, et
- Les dispositifs médicaux numériques, également entendus comme tout logiciel répondant à la définition de l’article 2 du Règlement (UE) 2017/745, mais présentant une visée thérapeutique.
Pour prétendre au bénéfice de cette prise en charge anticipée, les dispositifs concernés doivent satisfaire aux conditions suivantes :
- être présumés innovants, notamment en termes de bénéfice clinique ou de progrès dans l’organisation des soins, d’après les premières données disponibles et compte tenu d’éventuels comparateurs pertinents ;
- disposer du marquage CE dans l’indication considérée ;
- respecter la réglementation relative à la protection des données personnelles ainsi qu’aux référentiels d’interopérabilité et de sécurité applicables ; et
- permettre d’exporter les données traitées dans des formats interopérables, appropriés et garantissant l’accès direct aux données, et comporter, le cas échéant, les interfaces permettant l’échange de données avec des dispositifs ou accessoires de collecte des paramètres vitaux du patient.
Les modalités d’appréciation de ces conditions seront précisées par décret.
Excluant tout cumul avec un autre mode de prise en charge, l’octroi d’une prise en charge anticipée sera décidé par arrêté ministériel qui fixera, sur une base forfaitaire, le montant de la compensation financière.
En contrepartie, l’exploitant s’engage à déposer une demande d’inscription sur une liste de droit commun pour l’indication considérée dans un délai de 6 mois pour la LPPR et de 9 mois pour la liste « télésurveillance ». De plus, il s’engage, sous peine de pénalité financière, à assurer la continuité des traitements ou de la surveillance médicale initiée pendant la durée de la prise en charge anticipée, puis pendant une durée d’au moins 6 mois à compter de l’arrêt de pris en charge – ce délai étant réduit à 45 jours si l’indication concernée fait l’objet d’un refus de prise en charge.
Des modes de prise en charge subordonnés à l’utilisation effective des dispositifs médicaux numériques et au traitement des données générées
Qu’il s’agisse de la future prise en charge de droit commun des activités de télésurveillance médicale, ou de la prise en charge anticipée des dispositifs médicaux numériques, celles-ci seront subordonnées à l’utilisation effective du dispositif médical numérique par le patient, et, lorsqu’ils existent, à l’obtention de résultats individualisés ou nationaux d’utilisation en vie réelle.
Les données nécessaires au contrôle de l’utilisation effective du dispositif seront transmises à différents acteurs, notamment au service de contrôle médical de l’assurance maladie, et le refus de transmission opposé par le patient aura pour effet d’empêcher ou, le cas échéant, de suspendre la prise en charge ou le remboursement.